Les Vikings à l’assaut du Boulonnais (IXe-Xe siècle)

SOMMAIRE

  • De Charlemagne à Boulogne aux premières offensives
  • Boulogne, cité refuge au cœur de la tempête viking
  • Affirmation des pouvoirs locaux et apparition des premiers comtes boulonnais
  • Bibliographie
Navire viking, dit d’Oseberg, découvert en 1903 et conservé dans un musée à Oslo en Norvège. Il mesure 20 m de long et été construit au début du IXe siècle. C’est grâce à ce type d’embarcation que les Normands remontaient nos fleuves.

Explorateurs, rustres guerriers, pillards, marins audacieux et farouches paiens… beaucoup de choses nous viennent à l’esprit lorsque l’on évoque ces fameux vikings qui depuis quelques temps sont mis à l’honneur à travers la culture populaire (films, séries…). Assurément, ils ont marqué la grande histoire par leur geste guerrière et ont eu une influence certaine dans les régions du nord de la France actuelle. Apparus brutalement sous le haut Moyen Age, au VIIIe-IXe siècle, ces « Normands » originaires de la Scandinavie déstabilisent par leurs raids rapides et successifs des royaumes francs incapables alors d’assurer leur défense face à ce fléau d’un type nouveau. Grâce à leurs fameux « drakkars », ces longs navires à faible tirant d’eau, avançant à voile ou à rames, les Normands remontent les voies fluviales et pénètrent au cœur même du monde franc, jusqu’à Paris qu’ils assiègent en 845. Outre les pillages, les Normands commercent, font des esclaves, demandent des rançons ou encore le fameux danegeld, un tribut versé par des populations sans défenses aux Vikings afin de préserver leurs terres de la désolation… Leurs cibles prioritaires restent les centres urbains et les monastères, les lieux où se concentre la richesse, on le constate dans les régions du nord de l’empire franc où les moines de Saint Bertin relatent dans leurs annales la venue de ces hommes assimilées à des démons. Les Vikings passent bien entendu dans notre Boulonnais qui n’est pas épargné et clairement livré à lui même lors de ces dernières grandes invasions. Pourtant, la ville de Boulogne résiste aux Normands, grâce à ses vieux remparts romains, et devient même un point de ralliement pour les populations alentours, les dignitaires et moines qui emmènent avec eux leurs reliques sacrées. Ces refuges fortifiés, comme Boulogne, représentent la seule solution pour se protéger des attaques que les autorités carolingiennes ne peuvent contenir, malgré leurs efforts tout au long du IXe siècle…

De Charlemagne à Boulogne aux premières offensives normandes

Le phare de Boulogne, aussi appelé « Tour d’Odre », restauré par Charlemagne au début du IXe siècle. Reproduction de Luto (XVIIIe)

Dès la toute fin du VIIIe siècle, lors du règne de Charlemagne, les Vikings apparaissent dans les sources franques qui font état des premiers raids et de la violence de ces Normands ou « hommes du nord » (North-man). Ils sont Suédois, Norvégiens, Danois et vont, pendant plus d’un siècle, de la Baltique jusqu’à la Méditerranée en passant par l’Atlantique, explorer des terres inconnues, piller des villes et abbayes, traiter et commercer avec une multitude de peuples d’orient et d’occident. En Europe, ils s’attaquent d’abord aux royaumes anglais puis à la Frise dès les premières années du IXe siècle et menacent directement Dorestad, riche cité côtière et commerçante du nord l’empire franc. Dès 810, Charlemagne, couronné empereur depuis le 25 décembre 800 par le pape, prend la mesure de la menace et inspecte le littoral de la Manche et de la mer du Nord . Charlemagne tente lors de cette tournée de reconstituer l’équivalent du fameux « litus saxonicum », ancien système défensif de l’empire romain constitué d’avant-postes fortifiés dont l’objectif était de protéger nos côtes, alors menacées au IVe-Ve siècle par les pirates Saxons (voir article). Charlemagne passe à l’occasion de cette réorganisation du littoral, par cet ancien port impérial, Boulogne, qui accueille son premier empereur depuis la fin de l’antiquité. Assurément, notre cité boulonnaise est à cette période bien intégrée au monde franc et commence progressivement à retrouver ce statut de ville côtière stratégique qu’elle avait durant l’époque romaine. Lors de sa visite dans notre cité, Charlemagne édicte le « capitulaire de Boulogne », qui officialise la mise en place de ce nouveau « litus saxonicum », réglemente l’organisation des troupes et la défense locale mais aussi interdit l’exportation des armes franques vers les régions du nord. L’empereur y ordonne également la construction de bateaux militaires pour protéger les ports et navires commerciaux des pirates scandinaves; on ne peut s’empêcher d’y voir la résurrection de la prestigieuse Classis Britannica, l’ancienne flotte romaine de Bretagne également basée à Boulogne et dont la fonction était similaire. Charlemagne rétablit surtout l’ancien phare romain boulonnais, la fameuse « Tour d’Odre », qui avait été édifié au Ier siècle sur ordre de l’empereur Caligula pour célébrer sa victoire « contre les éléments marins » après sa tentative infructueuse de traversée de la Manche. Ce phare de douze étages et de forme octogonal, le premier en Gaule, guida les marins du détroit pendant plusieurs siècles avant vraisemblablement de tomber en désuétude à l’époque mérovingienne. Charlemagne, conscient de son importance par la recrudescence du commerce maritime dans la Manche, le rétablissement du « litus saxonicum » et la menace des vikings, ordonne ainsi de rallumer les feux de ce phare impérial en l’an 811, soit plus de 3 siècles après la chute de Rome. Un vent antique souffle assurément à cette période sur Boulogne dont le port, même si il n’a jamais été vraiment abandonné, a vraisemblablement un regain d’activité lors de la venue de Charlemagne.

Les attaques vikings dans le nord de la France. Tiré de l’ouvrage « Les Vikings en France » De Jean Renaud

Cependant, toutes ces mesures du prestigieux empereur ne seront guère efficaces durant le IXe siècle et ses successeurs, confrontés à la partition et à l’instabilité chronique de l’empire, ne parviendront pas à contenir la tempête viking. Dès Louis le Pieux (778-840), fils de Charlemagne et empereur à partir de l’an 814, les Normands multiplient leurs incursions sur la côte flamande et les sources franques y signalent une attaque massive de Danois en 820 qui est cependant repoussée. Cela ne décourage pas les Vikings qui remontent, dès 836, la Meuse et l’Escaut et atteignent par ce fait des prestigieuses abbayes et centres urbains, qui ne sont nullement préparés à un tel déferlement. La situation s’aggrave véritablement après que les trois petits-fils de Charlemagne, Lothaire Ier, Charles le Chauve et Louis le Germanique, se partagent l’empire en 843, lors du traité de Verdun. Rivaux, confrontés à des problèmes intérieurs, ils se révèlent incapables de protéger leurs terres des raids et préfèrent bien souvent traiter avec les envahisseurs, c’est à dire leur payer le Danegeld plutôt que de les affronter. Les Scandinaves s’enracinent ainsi véritablement dans l’empire franc et reçoivent même des fiefs en Frise en 841. Dès l’année suivante, ils s’attaquent pour la première fois à Quentovic, la riche cité commerçante carolingienne située sur les rives de la Canche. Par le paiement d’un tribut les habitants de cette rivale du port boulonnais sont épargnés mais ce n’est que partie remise et Quentovic sera bien souvent la proie des Normands durant le IXe siècle. Peu de temps après, en 850, ils parviennent par la Lys à Thérouanne, siège épiscopal de la Morinie dont relève Boulogne, qui est pillé comme de nombreux monastères aux alentours. La prestigieuse abbaye de Saint Bertin est attaquée quant à elle en 860 mais les reliques de Bertin de Sithiu sont sauvées grâce à l’ancien évêque de Thérouanne, Folquin (816-855), qui avait anticipé les attaques et caché dans un lieu tenu secret le corps du saint abbé. Bien souvent, les moines, livrés à eux même face à ce fléau, abandonnés par les autorités carolingiennes, n’ont d’autres choix que de fuir avec leur reliques sacrées et se réfugier en des lieux fortifiés. Boulogne est ainsi l’un des rares sites qui peut accueillir ces religieux en perdition.

Boulogne, cité refuge au cœur de la tempête viking

Les Vikings attaquent les monastères. Les Moines de l’abbaye de Saint-Wandrille seront obligés de se réfugier dans la ville fortifiée de Boulogne.

En 862, le roi de la Francie occidentale et petits-fils de Charlemagne, Charles le Chauve (823-877), décide de prendre des mesures fortes pour limiter les incursions normandes, au lieu de systématiquement payer le Danegeld. En 864, dans l’édit de Pitres, il réitère l’interdiction de vendre des armes franques aux ennemis du royaume et ordonne surtout l’édification, dans les bassins de la Loire et de la Seine, de forteresses et ponts pour empêcher les Vikings de remonter ces fleuves. Vraisemblablement, Charles exige également la construction de telles structures défensives sur l’Escaut et confie la défense locale à des aristocrates, notamment au premier comte fonctionnaire de Flandre, Baudouin Bras de Fer, qui parvient en 864 à repousser une incursion normande. Malgré cette politique proactive du roi franc, les attaques, même si elles sont ralenties, continuent, voir s’intensifient, et les populations côtières sont toujours contraintes à l’exode et à se réfugier derrière les quelques points fortifiés, telle la Haute Ville de Boulogne. Notre cité accueille ainsi dès 866, les moines bénédictins de Saint Wandrille dont l’abbaye, située non loin de l’embouchure de la Seine, a été détruite par les Vikings quelques années auparavant. Ces religieux réfugiés à Boulogne ont emmené évidemment avec eux leurs précieuses reliques, tels les restes de leurs saints, ceux de Wandrille, mais aussi de Ansbert et Wulfran, l’ancien archevêque de Sens. Cinq ans plus tard, en 871, la cité boulonnaise offre l’hospitalité à un haut dignitaire, Actard, l’évêque de Nantes, futur archevêque de Tours, dont le diocèse a été ravagé et conquis par les hommes du nord qui en feront bientôt une véritable principauté normande. Il faut noter que les Vikings, dès la deuxième partie du IXe siècle, commencent à hiverner et même à s’installer durablement dans l’ancienne Gaule Belgique, comme dans la région gantoise où ils investissent durant l’hiver de 879 l’abbaye bénédictine de Saint Bavon à partir de laquelle ils lancent des raids dévastateurs vers Arras et Cambrai. Le riche vicus côtier de Quentovic est lui de nouveau pillé et ravagé en 881 et ne passera vraisemblablement pas le IXe siècle. Selon Hubert le Bourdellès, Quentovic ne disparaîtra cependant pas mais sera en réalité transféré sur une position défendable et deviendra Montreuil-sur-Mer. Le petit port voisin, Etaples, ou de son nom antique, Stapula, est également la proie des Viking à cette époque.

Extrait des Annales de Saint-Vaast, texte historiographique écrit au début du Xe siècle, donc contemporain des événements, où il est évoqué l’arrivée des Danois à Boulogne (« Bononiam » dans le texte) durant l’année 884 de notre ère.

La région boulonnaise doit subir quant à elle une arrivée massive de Danois dès 879 et voir bientôt l’invasion non seulement de son port mais aussi de tout son arrière-pays qui est ravagé. Quelle étrange ironie, les Saxons qui envahirent eux mêmes le Boulonnais à la chute de Rome (voir article), et désormais bien installés sur nos terres, deviennent à leur tour victimes d’invasions germaniques quelques siècles plus tard… Ainsi, les abbayes fondées au VIIe siècle par Saint Wulmer, celle de Samer et le couvent de Wierre-au-Bois, sont pillées et détruites par les Vikings. Seul le monastère samérois sera restauré par la comtesse Ide au XIe siècle et deviendra un lieu de sépultures pour les comtes boulonnais. Les plus importantes reliques de ces deux fondations religieuses, dont le corps de Saint Wulmer, sont cependant sauvées et entreposées probablement dans la Haute Ville de Boulogne qui, grâce à ses remparts, résiste toujours aux Scandinaves en cette funeste décennie où le détroit est intégralement contrôlé par ces derniers. Les Boulonnais ne font-ils cependant que résister durant ce temps où les Vikings investissent leur terres ? Ne s’entendent-ils pas par nécessité avec ces hommes du nord qui, après tout, sont quasiment issus de la même aire culturelle qu’eux ? L’on sait que les Scandinaves ne font pas que piller, rançonner et guerroyer, ils commercent également et traitent souvent avec les populations locales lorsqu’ils y trouvent un intérêt. Ils proposent même leurs services, en tant que mercenaires, aux différentes factions du royaume en ces temps où les conflits entre seigneurs francs ne sont pas rares. Par le manque de sources de l’époque, on ne peut que faire des suppositions concernant les relations entre nos Boulonnais, par ailleurs fraîchement christianisés, et ces Normands païens. On peut au moins affirmer qu’une armée viking, après avoir dévasté les régions du nord de la Francie comme la Flandre , l’Amiénois et l’ Arrageois entre autres, embarque vers l’Angleterre en 884 à partir du port de Boulogne, non sans avoir été payé près de 12,000 livres par le roi Carloman (867-884). Durant cette décennie, les Scandinaves essuient toutefois une défaite notable, lors de bataille de Saucourt-en-Wimeu (Somme actuelle), où le souverain franc Louis III, aîné de Carloman et héritier de Charles le Chauve, sort victorieux d’une importante troupe danoise. Cela n’empêche pas une autre armée viking d’assiéger Paris en 885 qui subit une nouvelle fois le pillage, malgré l’intervention du nouvel empereur Charles le Gros (839-888). Vraisemblablement, il faut attendre 892 pour que les Danois repartent pour un temps de nos régions, toujours à partir du port de Boulogne. Ces derniers y construisent, probablement avec le bois des denses forêts boulonnaises, plusieurs centaines de bateaux et se rendent en Angleterre où ils y gardent des solides positions à partir desquelles ils peuvent toujours lancer des raids vers le littoral franc.

Affirmation des principautés et apparition des premiers comtes boulonnais

La Flandre à la fin du haut Moyen Age et ses forteresses circulaires bâties sous l’impulsion du comte Baudouin II au IXe siècle. Voir aussi le comté de Boulogne, alors vassal de la Flandre.

Ces attaques successives normandes ne sont pas sans conséquences politiques au sein de l’empire franc et surtout sur la dynastie carolingienne qui est délégitimé au cours de cette crise. Durant tout le IXe siècle on assiste à une affirmation des pouvoirs régionaux face à un pouvoir central affaibli qui se révèle incapable, malgré les quelques mesures prises, de protéger la population des Normands. Cette crise entre les rois franc et ses « fidèles », se manifeste notamment en 858, alors que le souverain de Francie occidentale, Charles le Chauve, tente d’imposer son fils Louis à la tête des régions entre Seine et Loire, en fondant pour lui un nouveau royaume de Neustrie. Cette initiative provoque la colère d’un puissant seigneur de la région, Robert le Fort, qui prend pour prétexte l’incapacité de Charles à régler le problème normand pour hisser la bannière de la rébellion. Il parvient ce faisant à réunir autour de lui un grand nombre de conjurés, notamment l’abbé Adalhard de Saint Bertin, le comte de Troyes, et fait même appel au roi de Francie orientale, Louis le Germanique. Au bout de quelques années, Charles le Chauve parvient, non sans difficultés, à mettre un terme à cette fronde et interdit dans la foulée à ses vassaux, par l’édit de Pitres que nous avons déjà évoqué, la construction de « castella » (motte castrale) ; il réaffirme ce faisant son pouvoir régalien de fortification. Dans les faits, le souverain franc ne parvient pas à imposer cette règle et évêques, abbés, comme comtes fonctionnaire font édifier, de leur propre initiative, des murs autour de leurs villes et abbayes. Cela se révèle parfois efficace et la cité de Saint Omer résiste ainsi à une incursion normande grâce à son enceinte mais aussi par la résistance farouche de la population elle même. Outre ces fortifications, on constate également la multiplication de nouvelles forteresses de forme circulaire sur les littoraux de la Manche et de la mer du Nord, notamment à Bergues ou encore à Furnes, que l’on doit peut être aux premiers comtes de Flandre, associés en cela à des seigneurs laïques et ecclésiastiques, dont l’autorité est de plus en plus importante à la fin du IXe siècle. D’autant plus après le capitulaire de Quierzy (877) qui officialise l’hérédité des charges comtales.

Arnoul Ier de Flandre

Il n’est pas anodin que ce soit en ces temps d’affirmation des pouvoirs locaux et des invasions normandes qu’apparaissent dans les sources les noms des premiers comtes de Boulogne. Au cours du IXe siècle notre terre est ainsi dirigée par deux mystérieux personnages, Engischalk, puis par un certain Erkanger qui est semble -t-il un proche du roi Charles le Chauve. On ne connaît pratiquement rien de ces premiers comtes fonctionnaire boulonnais qui ont très probablement dû faire face aux invasions normandes. Il est vraisemblable cependant qu’Erkenger soit victime de l’ambition du comte de Flandre Baudouin II, fils de Baudouin Ier et de la fille de Charles le Chauve, qui envahit le Boulonnais à la fin du IXe siècle. Baudouin II, profitant de l’instabilité politique et des incursions scandinaves, se constitue en effet un vaste territoire au nord du royaume à cette période. Avec lui, naît véritablement la prestigieuse dynastie des comtes de Flandre dont une des branches va donner celle des fameux comtes de Boulogne. A la mort du deuxième Baudouin en 918, son territoire est partagé et le Boulonnais mais aussi le Ternois reviennent à son fils cadet , Adalolphe. Ce dernier combat avec son frère aîné Arnoul Ier les Vikings, notamment ceux de l’ambitieux nouveau comte de Normandie, Rollon, dont la volonté d’expansion territoriale l’amène jusque dans les possessions flamandes. Rappelons que ce Rollon conclut un pacte défensif avec le roi Charles le Simple qui lui accorda, avec le traité de Saint-Clair-sur-Epte en 911, une terre correspondant approximativement à la Haute-Normandie actuelle. Outre cela, les incursions des hommes du nord sont plus rares au Xe siècle, même si il faut noter l’apparition d’une petite principauté danoise à Guînes en 928 qui rentre toutefois rapidement dans le giron flamand. Quoi qu’il en soit, Adalolphe meurt en 933 et Arnoul Ier, comte de Flandre, s’empare dans la foulée de son héritage au détriment de ses neveux. C’est lui qui fait transférer vers Gand, dans les années 940, les prestigieuses reliques entreposées dans la Haute Ville de Boulogne depuis le début des attaques vikings, et probablement celles de Saint Bertulphe de Renty, qui avaient été déposées 20 ans avant derrière les murs boulonnais, sur ordre du roi carolingien, Charles le Simple (879-929).

Arnoul Ier, dont le prestige est grand durant son règne, doit toutefois subir en 961 une révolte d’un des fils d’Adalolphe, également nommé Arnoul, qui parvient finalement à se rendre maître du Boulonnais. Selon le médiéviste Ferdinant Lot, cet Arnoul de Boulogne, appelé aussi Ernulfus dans les sources, serait en réalité le fameux comte Hernequin, celui là même qui aurait tué avec son armée 8000 vikings dans notre région. Jacques Malbrancq, jésuite et historien du XVIe, supposera que cette bataille est à l’origine du nom de la commune de Wimille (huit-mille), lieu présumé de l’affrontement. Soyons clair cependant, cette interprétation relève de la légende et aucune source de l’époque carolingienne n’atteste d’ailleurs de ce combat. Arnoul/Hernequin a lui toutefois bien existé, peut être effectivement combattu des Normands, et règne jusqu’à la fin du Xe siècle sur le Boulonnais et le Ternois. Avec lui et ses successeurs, s’amorcent véritablement l’histoire des prestigieux comtes de Boulogne qui parviendront, un temps, à échapper à la tutelle flamande et même à étendre leurs possessions au delà de la Manche. Quant au Boulonnais lui même, il ne passe certes pas indemne la période viking, mais en ressort finalement renforcé par la résistance de sa cité fortifiée qui redevient le point de passage privilégié vers l’Angleterre à l’issu de ces « dernières grandes invasions barbares ».

Bibliographie

  • BUHRER-THIERRY, Geneviève, MERIAUX, Charles, La France avant la France (481-888), Belin, 2014
  • DESMULLLIEZ Janine, MILIS Ludo, Histoire des Provinces françaises du nord tome 1 de la préhistoire à l’an Mil, Artois Presse Université, 2008
  • HAIGNERE Daniel, Dictionnaire historique et archéologique du Pas-de-Calais, tome 1, éditions culture et civilisation, 1978 (rééd)
  • HELIOT, Pierre, Histoire de Boulogne et du Boulonnais, Marseille Laffite, 1980 (rééd)
  • LE BOURDELLES Hubert, « Les ports de la Canche à l’époque gallo-romaine et dans le haut Moyen Age » in les Hommes et la mer dans l’Europe du nord-ouest, de l’antiquité à nos jours, pp 179-188, Alain Lottin Jean-Claude Hocquet, Stéphane Lebecq éditeurs, 1986
  • LOT Ferdinand. La Mesnie Hellequin et le comte Ernequin de Boulogne. In: Romania, tome 32 n°127, 1903. pp. 422-441. https://www.persee.fr/doc/roma_0035-8029_1903_num_32_127_5300
  • LOTTIN, Alain, Histoire de Boulogne sur Mer, Septentrion, 2014
  • LOTTIN, Alain (dir.), Les grandes batailles du Nord de la France, éditions Mazarine, 1984
  • TRENARD Louis, Histoire des Pays-Bas Français, Privat, 1972
Enluminure du XIIe siècle représentant des vikings armés. Réalisé à l’abbaye de Saint Aubin à Angers.

Laisser un commentaire